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Timothée Richard 15.12.20

Post-Chrétienté

Décryptages

En Occident, la dynamique centrifuge de la chrétienté est révolue. Nous voici dans une métamorphose culturelle majeure, qui ouvre la porte à d’autres appropriations du sacré.

Aux États-Unis, les non-croyants devraient passer de 59 millions en 2010 à 111 millions en 2050, et en Europe de 140 millions en 2010 à 162 millions en 2050.

Si la thèse d’une « sortie de la religion » n’est pas nouvelle, puisque qu’elle a été soufflée dans les années 80’, l’incarnation du phénomène par les faits – taux de fréquentation de l’église, appartenance religieuse et croyance en Dieu – n’a jamais été aussi palpable dans le monde occidental.

Outre-Atlantique, d’ores et déjà 25% des adultes de moins de 30 ans ne croient en aucune tradition religieuse et préfèrent s’identifier comme athée ou agnostique. Et selon l’institut d’étude américain Barna, spécialisé dans les influences de la culture et des croyances, cet athéisme va doubler au sein de la Gen Z (née entre 1995 et 2015), première génération qu’il qualifie de véritablement « post-chrétienne ».

Une historique apathie religieuse

Pour cette nouvelle génération, « athée » n’est plus un gros mot : le pourcentage d’adolescents qui s’identifient comme tel aux Etats-Unis est le double de celui de la population totale (13% contre 6% des adultes). A l’inverse, si 75% des baby-boomers sont encore chrétiens (protestants ou catholiques), seulement 59% de la Gen Z se revendique d’une telle appartenance selon l’étude menée en 2018 par Barna. Une première au vu de la tradition historique du pays.

Plus que toute autre génération avant eux, la Gen Z n’affirme donc pas d’identité religieuse.

Une situation décryptée plus profondément par le pasteur Jon Perrin dans son livre « The Coming Post-Christian Tsunami » – connecting with an increasingly unchurched culture – et relayée en France par l’historien contemporain Guillaume Cuchet qui fait référence dans « Comment notre monde a cessé d’être chrétien » à la marche de cette grande rupture religieuse en Europe.

Quid des raisons de ce changement de paradigme ?

Si la question du mal et des injustices intrinsèques au monde n’est pas nouvelle, les réponses apportées par l’institut d’étude, qui a interrogé les jeunes sur leurs « barrières à la foi », proposent deux données majeures qui l’expliquent sur le long terme :

1 – Le positionnement des chrétiens, perçus comme « hypocrites », vis-à-vis de l’inclusivité

Notamment sur les droits des personnes LGBTQ+, la pauvreté et les politiques d’immigration, sous-haute surveillance.  Le meilleur exemple depuis deux ans : le gouvernement « très chrétien » de Donald Trump, qui inquiète sur la capacité de ceux qui l’incarnent à s’apposer aux concepts de « co », d’open space et de « design for all » comme valeurs dominantes.

2 – Le caractère de plus en plus insaisissable de la notion de vérité.

A l’ère du « tout vraisemblable » et de la crise de confiance, pour beaucoup d’adolescents, la vérité semble au mieux relative, au pire totalement inconnaissable. Pour preuve : plus de la moitié des américains – 58% des adolescents et 62% des adultes – sont d’accord avec l’énoncé suivant : « De nombreuses religions peuvent mener à la vie éternelle. Il n’existe pas de « véritable religion ». En pensant explicitement que ce qui est vrai pour quelqu’un peut ne pas être vrai pour soi.

A cela il faut ajouter la quête d’horizontalité et de décentralisation, qui, étayée par les sociologues, traduit une volonté inégalée d’autodétermination et d’émancipation face aux traditions qui ont constitué la modernité. D’où le concept de post-modernité, repris par les sociologues comme Michel Maffesoli.

Cette nouvelle génération est toujours attirée par des choses spirituelles, mais avec un point de départ très différent des générations précédentes. Et cela explique pour beaucoup la relation qu’ils mènent avec leur consommation.

Le présent, le mystère et la communauté ; nouveaux marqueurs spirituels dans nos sociétés

Pour examiner la culture et les motivations qui façonnent au contraire cette génération, d’autres formes du sacré et de « temples » communs apparaissent pour autant.

Le « présentisme » sous ses formes les plus diverses – renouveau zen, retraites holistiques, techniques hypnotisantes, chamanisme… – revient avec les codes d’une charge spirituelle assumée, qui sont le signe d’une nouvelle négociation avec la discontinuité. Sortir de soi pour être plus réceptif à soi-même.

En témoigne le bond charismatique du concept de vie intérieure, mais aussi des incarnations plus transversales de l’humeur dans les offres commerciales : #moodfood, #moodtravel (Soulcity) #moodbeauty (MoodBeli), ou #moodclass (The Good Mood Class) qui évangélisent autour de l’énergie positive, et de la prise de conscience de soi.

Les mots clés : introspection et profondeur innovante du ralentissement.

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