
Une autre idée de la fidélisation
DécryptagesA l’aube du double 20, la « brand loyalty » s’éloigne du traditionnel transactionnel pour se réinventer au prisme d’une expérience client qui navigue entre divertissement, immersion et story living.
Dans une prise de parole remarquée l’année dernière, Martin Lewis, fondateur du site Web Money Saving Expert, annonçait « les dernières étapes des cartes de fidélité ». Un message qui faisait écho non seulement à l’étude de Colloquy Loyalty– annonçant que plus de la moitié (54%) de ces supports restaient inutilisés aux Etats-Unis – mais aussi à la décision de plusieurs enseignes, Décathlon en tête, qui ont décidé de délaisser leur traditionnel système de points pour entrer dans une ère plus relationnelle avec leurs consommateurs.
Ainsi, et alors que le sentiment de crise de confiance – vis-à-vis des marques – est toujours une réalité structurante, plusieurs marques commencent à mettre en place des stratégies métissées, qui s’adressent non plus seulement au consommateur rationnel, mais à l’individu, sa dimension émotionnelle, voir à sa communauté dans une perspective plus large de considération.
La fin de la loyauté transactionnelle
Selon Bryan Roberts, expert en stratégie de fidélisation chez TCC Global, le concept clé pour la décennie qui vient est la fidélité émotionnelle plutôt que la fidélité transactionnelle qui a drivé jusqu’à présent les systèmes de points.
A une époque où on ne parle plus de « transaction » mais de « démarche » et de « parcours d’achats », la logique qui a porté l’avènement des remises, coupons, et bons d’achats s’éclipse au profit de facteurs plus expérientiels.
Une notion plus intuitive de la fidélité ?
L’essor des néo-privilèges
Dans les secteurs tertiaires – voyage, hôtellerie, banque, assurance en tête -, même si le modèle traditionnel de points et de mutualisation des dépenses reste effectif, à l’instar du succès de The Points Guy – un site qui attirait 5 millions de visiteurs uniques par mois en 2018 -, l’aspect relationnel et communautaire a passé un cap intéressant cette année.
L’hôtellerie est à la pointe de cette mutation en développant des applications qui il y a quelques années auraient été perçues comme disruptives comme Hilton Honors, permettant aux clients de s’enregistrer, d’obtenir des conseils personnalisés, de fluidifier les prises de contact, comme avoir accès aux informations clés de la marque.

A plus grande échelle, Marriott International à fait un partenariat inédit avec Coachella, comprenant pour les membres de sa communauté Mariott Rewardsun sésame VIP en yourtes pendant le festival. Une politique qui vient s’insérer dans une logique de « faits marquants » #mémorable à même de créer du souvenir.

Sur des bases similaires, privilégiant cette fois le long terme et la distinction entre expérience de voyage « one shot » et relation long terme avec la marque – OneFineStay (Un concurrent direct d’Airbnb racheté par le groupe AccorHotels en 2016) a lancé son « Higher Living » program, un service de conciergerie personnalisé durant le séjour, et ce pendant un an après le voyage.
Un crédo qui a aussi inspiré Starwood (propriété aussi du groupe Marriott) en 2018 en lançant son « Starwood Preferred Guest » en partenariat avec American Express, offrant à ses clients fidèles un accès aux avantages non seulement du portefeuille de l’enseigne mais aussi aux marques hôtelières du groupe (RitzCarlton, St Regis, …).
L’idée cette fois : renforcer l’idée d’un « écosystème de fidélisation », mettant en avant son réseau de partenaires, et qui permet aussi de capitaliser sur une image de marque lifestyle pluridisciplinaire capable de répondre aux socio-styles des temps modernes.
L’émergence du « care » et du coaching personnalisé
Alors que le soin prend de plus en plus de place dans la société, répondant au phénomène d’anxiété, plusieurs marques décident de miser sur une relation plus horizontale, empathique, se mettant dans une relation d’égal à égal avec ses consommateurs. Un choix déterminant dans les développements respectifs de Luko– la néo assurance online référente mettant en avant une langue parlée – mais aussi de la mutuelle de santé Alan, dont la plateforme de marque, après un long travail avec DesignStudio, est désormais drivée par la notion de « Friendship ».


Au Royaume-Uni, capitalisant sur la data et la connaissance de leurs clients au sens large comme le sentiment que les consommateurs s’insèrent durablement dans le « Less (Choice) is More », le pharmacien Boots se positionne aussi humainement comme la solution au « dilemme du don moderne » (en référence à Noël) avec une campagne de personnalisation de masse #GiftLikeYouGetThem » centrée sur la capacité de chacun à trouver le bon cadeau.

Des services annexes pour dire son attachement
D’autres ont décidé d’approfondir cette perspective relationnelle en proposant des services totalement déconnectés de leurs cœurs de métiers. Et développer des services d’#hypersatisfaction qui font références aujourd’hui en termes d’inventivité.
Nocibé à décider de renforcer l’ouverture et l’inclusivité de son service client par la Sourdline, une plateforme spécialisée dans la mise en place d’un système relationnel avec les malentendants.
Et dans la distribution, l’année dernière, Bio c’est bon ne proposait pas non plus de points de fidélités mais d’arroser les plantes de ses clients pendant leurs vacances. Pendant que Carrefour, en pleine période de cristallisation sur le genre, propose de livrer (gratuitement) pendant 9 mois les femmes enceintes.
A l’ère de ce new relationalism, ces partis-pris sont autant de réponses à un consommateur qui se déprend des logiques seulement rationnelles pour aller vers l’humain ; l’expérience et la primauté des situations relationnelles sur les choses.
Image à la Une : Bootiques