BRAI : Make chill great again
DécryptagesBrai, la marque du confinement et des familles heureuses en pyjama imprimés all-over vient d’ouvrir sa boutique malgré les événements récents. Interview !
Imprimés animaux sur tous les fronts, joggings féminins, logomania et pyjamas assortis pour toute la famille… Depuis trois ans, l’étoile montante du loungewear BRAI incarne le confort éco-responsable avec humour et légèreté. Comme tous les labels « digital natives », elle profite des réseaux sociaux et de la montée en puissance de l’économie de la maison pour monter son empire du pyjama. Hier, elle ne vivait que sur internet via son e-shop, aujourd’hui, malgré une ouverture retardée par le confinement, BRAI a pignon sur rue dans le 16ème arrondissement de Paris.
Portrait de deux sœurs entrepreneurs qui érigent ensemble le confort en art de vivre, avec humour et auto-dérision.
Pouvez-vous vous présenter et nous raconter votre parcours ?
Nous sommes deux sœurs, Estelle Renard et Loren Desmoineaux. Je (Estelle) suis styliste de formation, j’ai étudié à l’ESAA Duperré et au Studio Berçot, puis j’ai travaillé pendant 6 ans dans le luxe comme designer chez Lanvin, Balenciaga, et Lucien Pellat-Finet. Je suis ensuite partie vivre à Los Angeles où je dirigeais la création Femme et Enfant pour la marque américaine Juicy Couture pendant 4 ans. Loren est diplômée de l’ISG. Elle a débuté chez Smartbox en tant que business développer, puis elle a évolué vers le secteur de la publicité au sein d’une régie mobile. Elle a ensuite rejoint Orange Advertising où elle avait la responsabilité du programmatique. J’avais toujours eu une forte envie d’entreprendre et quand j’ai créé BRAI en 2017 à mon retour de Los Angeles, c’est naturellement que Loren est venue rejoindre l’aventure. Nos compétences créatives et digitales, ainsi que nos caractères, sont très complémentaires. C’était assez évident de se retrouver sur ce projet qui plus est, porte notre nom à toutes les deux.
Quelle est la place de l’inspiration chez BRAI ?
Elle est constante, nous ne prenons pas de moments à proprement parler pour créer. C’est souvent une rencontre, un article, une image qui déclenchent une envie. Nous fonctionnons beaucoup à l’instinct : nous partons du principe que si nous en avons le désir, alors c’est que certainement nous ne serons pas les seules. Comme une envie de chocolat qu’il faudrait assouvir, on a parfois envie d’une couleur, d’une forme, d’une matière, et quand l’envie persiste, c’est là qu’elle se matérialise. Nous nous envoyons des dizaines d’images chaque jour pour nourrir cette créativité. Des images pas forcément accompagnées d’un mot, mais qui nous évoquent quelque chose. On se crée de façon complètement naturelle une banque d’images dans laquelle nous allons puiser quand le moment vient de dessiner la collection, comme une piqûre de rappel de tout ce qui nous a touchées ces derniers temps, afin de s’assurer d’être toujours dans le présent et de toujours apporter quelque chose de nouveau.
NellyRodi débute sa nouvelle année sous le thème de la Renaissance. Comment incarnez-vous ce besoin de renaître et de se réinventer face à la crise sanitaire ?
Dès le début du confinement, le besoin de rebattre les cartes a été une évidence. On devait changer. On a choisi de reprendre le contrôle, que ce soit sur nos usines que nous avons rapatriées au Portugal et en France, mais aussi sur nos revendeurs qui sont une inconnue parfois dangereuse dans l’équation économique d’une jeune entreprise. Nous avons décidé de capitaliser sur notre communauté, notre boutique et une fabrication plus proche. Toujours rester agile, être libre de ses choix. Cela a imposé pas mal de décisions sur lesquelles nous hésitions, assez évidentes. Structurer toujours plus BRAI grâce à des outils digitaux de trésorerie, de stockage, de caisse. Prendre un logisticien pour fluidifier les envois et nous permettre de nous concentrer sur les choses importantes. Distiller une image de BRAI encore plus forte et assumée. Ne pas avoir peur d’avoir de la personnalité et de ne pas plaire à tout le monde. Assumer un véritable point de vue et foncer.
Vous avez ouvert le 13 mai, soit deux jours après le début du déconfinement. Comment avez-vous vécu cette période ?
Ce fut une période merveilleuse. On avait envie de retourner sur le terrain, de mettre la touche finale à cette boutique que nous avions abandonnée deux jours avant son ouverture (qui était prévue le 17 mars). Les gens avaient une forte envie de revivre comme avant, une forte envie de dépenser, de faire plaisir et de se faire plaisir. Tous ces moments de bonheur partagé avaient été mis entre parenthèses pendant deux mois et ils voulaient rattraper le temps perdu. Les mois de mai, juin et juillet étaient légers et insouciants. Le business était florissant et l’accueil a été extraordinaire.
L’économie de la maison, et le confinement ont fait exploser « l’inactivewear » et ont mis la notion de confort au premier plan. Cela a-t-il eu un impact chez BRAI ?
Oui, dès les premiers jours du confinement, nous avons vu les ventes exploser alors même que nous venions d’arrêter toutes nos campagnes de pub digitales. Tout le monde s’est retrouvé scotché à son téléphone ou son ordinateur et Instagram a pris un essor encore plus important. Les gens achetaient des pyjamas comme ils stockaient les pâtes ou le papier toilette. Avoir des vêtements d’intérieur confortables, éco-responsables et avec du style devenait une priorité. Il fallait s’équiper pour cette « guerre » qui se passait désormais sur nos lits ou nos canapés. Les gens ont eu une envie instantanée de confort, mais aussi de protection. Ils avaient aussi un besoin fort d’être rassurés sur les marques qu’ils achetaient durant le confinement. Acheter un marque française, jeune et digitale prenait aussi tout son sens. Les clients nous traduisaient leur soutien par leurs achats, en soutenant l’économie et la création française.
D’où vient l’inspiration de votre boutique toute rose ? En quoi fait-t-elle partie de l’expérience BRAI ?
Dès le début, nous savions que nous voulions une boutique mémorable. Un parti pris fort et surtout pas tiède. Pas une énième « boutique-appart » (nos voisines Sézane et Sarah Lavoine le font déjà très bien). L’idée d’une « boîte » de couleurs est venue assez vite car les imprimés prennent tellement de place dans notre univers qu’il fallait que le produit soit au centre de l’attention. Nous voulions également créer un lieu instragrammable car cela fait partie de notre identité. Nous voulions que les gens aient du plaisir à s’y prendre en photo et que la boutique soit reconnaissable juste à sa couleur.
Nous nous sommes inspirées de lieux comme le Ice Cream Museum à New York ou d’un pop-up store vert fluo imaginé par Virgil Abloh pour Louis Vuitton à New York, mais aussi le travail d’architecte comme Pierre Yovanovitch, Guillermo Santoma ou Kelly Wearstler avec qui j’ai travaillé à Los Angeles.
BRAI n’était jusqu’ici qu’une marque digitale, nous voulions que les gens soient interpellés par la boutique, que ce soit un lieu qui fasse parler. Nous avons gardé un aspect très clean, même vide parfois. Le but n’était pas de mettre des produits du sol au plafond, mais de faire vivre une expérience. Le miroir au plafond dans l’entrée, les arches qui se reflètent à l’infini dans les miroirs de la même forme, cette plante verte posée au milieu de cette boutique rose comme une oasis au milieu du désert, et cette phrase dans la cabine « Le bonheur t’appelle » : tout est fait pour interpeller les gens, les amuser et les amener à se questionner. Les produits sont exposés comme des créations minutieusement agencées.
Rentrer chez BRAI, c’est comme sauter dans l’écran quand on regarde un film ou un dessin animé. On entre dans notre monde.