Empathic Beauty
DécryptagesBiais émotionnel puissant dans le marketing, l’empathie devient le mode de fonctionnement privilégié d’une nouvelle génération de marques pour créer un autre degré de compréhension affective avec le consommateur.
Définie dans le langage courant par la faculté à « se mettre à la place de », la culture de l’empathie se caractérise du côté des marques par la capacité à adopter la perspective du client, à comprendre son état émotionnel, mais aussi ses besoins d’une manière plus scientifique.
Alors qu’elle avait été évoquée avec insistance à SXSW 2018, la beauté s’en fait aujourd’hui le porte-parole avec des formes distinguées : la progression de la data, un meilleur degré d’information scientifique et une forme plus participative du processus de création des produits.
La data, modèle d’écoute active
Côté produit, c’est la data fournie par le consommateur qui est le moyen d’une relation plus agile. Alors que le mindset a fait ses preuves par Function of Beauty, les offres qui conjuguent questionnaire et algorithme de personnalisation se multiplient aux Etats-Unis. Jusqu’à devenir la garantie même d’une ultra-pertinence clinique.
Curology crée des mix ultraciblés à partir des sources personnelles clients – photos, historique de traitements, objectifs de vie etc. Et la stratégie qui fonctionne grâce à l’intelligence artificielle est imitée en Californie par Versed et Mxt, décodant – âge, type de peau, environnement, mode de vie, objectifs – par un questionnaire qui prend en compte par exemple la sensibilité de la peau, la réaction à certains parfums avant de créer un régime sur mesure. Avec bientôt une formule d’abonnement à la clé.
Des nouveaux entrants se positionnent aussi sur les soins capillaires : aux Etats-Unis toujours, Prose lance une gamme Made-To-Order sophistiquée : 135 critères, 50 milliards de formules personnalisées adossée à une prise de contact sous forme de consultation et la réponse française est apportée par Just Shampoings incarnant le « made with empathie » par un diagnostic capillaire assez similaire.
Test & learn culture
Les géants industriels permettent aussi de franchir un cap sur un degré plus scientifique de connaissance de ses spécificités. Début 2019, La Roche-Posay (L’Oréal) a lancé une petite révolution avec My Skin Track pH (premier capteur accompagné d’une application dédiée) qui permet d’avoir une lucidité totale sur l’évolution du pH de sa peau.
Dans la même idée, L’Oréal et ModiFace (une tech compagny acquise par le groupe) viennent de mettre au point SkinConsult AI, la première app qui utilise l’intelligence artificielle pour faire un diagnostic personnel du vieillissement de la peau.
Deux exemples qui s’ajoutent à celui de My Skin Track UV, présenté l’année dernière au Consumer Electrics Show, qui prouvent que L’Oréal est décidé à faire bouger les lignes, d’une part sur la connaissance des besoins dédiés et plus loin dans l’orientation vers les produits les plus ciblés.
Côté US on retrouve aussi des solutions at-home sous forme de kit. A l’image des coffrets proposés par Atolla, lancés en 2018 par le MIT, multipliant les analyses de la peau – huile, pH, etc – et orientant vers un service de sérums personnalisés.
La particularité cette fois : un suivi dans le temps développé par machine learning qui s’adapte à l’avancement de la peau du consommateur.
Autre source inspirationnelle qui sort de l’aspect purement tech : Typology prend aussi l’élan d’une compréhension profonde des problématiques conso.
Après la gamme LAB – une série clinique de sérums pour régler des problèmes ciblés -, la marque française sort une gamme de quatre sérums périodiques qui répondent aux variations hormonales de la peau des femmes. Dans la rubrique conseil, on retrouve de la même façon une manière plus personnelle d’identifier son type de peau (normale, sèche, mixte, grasse) et les actifs qui y correspondent.
Co-construction des lignes de produits
Alors que le niveau de diagnostic se nivel par le haut un peu partout, un degré nouveau d’empathie est enfin franchi par des offres qui donnent la parole à leurs clients dans le choix et la définition créative des termes du produits. A l’image de Nidé, néo-marque parisienne prônant un processus de création co-constructif, en totale harmonie avec le consommateur. Le mode de fonctionnement est cette fois inversé mais correspond largement au sentiment général : non pas seulement être écouté et donner son avis, mais participer pleinement au processus d’élaboration pour avoir un produit le plus pertinent et personnalisé possible.
A parts égales, c’est finalement ce qui fait la force de cette nouvelle génération – cette capacité à poser un regard empathique sur la beauté, à inventer des concepts qui sortent du cadre et dessiner une autre manière d’impliquer le consommateur.
Image de Couverture : Mxt