D'outsiders du secteur à habilleuses de stars, la surprenante ascension de Salut Beauté
InterviewsCe mois-ci, Marie Dupin reçoit Mathilde et Sarah, les deux fondatrices de Salut Beauté, jeune marque de tailleurs audacieux, puissants et confortables. Echange en toute spontanéité, simplicité et transparence.
Quelle a été l’histoire de votre rencontre et de la genèse de Salut Beauté ?
M : Sarah et moi nous sommes rencontrées il y a plus de 4 ans, dans notre ancienne boîte. Nous travaillions toutes les deux en marketing digital. Salut Beauté est partie d’une discussion, entre copines, sur le fait que le total look est hyper pratique. Sarah et moi en abusions totalement, du tailleur à la combi en passant par le top/pantalon qui se match. Tu t’habilles en 2 secondes et tu passes dans tous les contextes ! On s’est dit que ce serait génial d’avoir une marque chez qui tu peux trouver les total look sous toutes ses formes et c’est là que la magie a opéré entre nous et qu’on a décidé de créer une marque dédiée aux tailleurs.
S : On a un parcours académique assez classique, mais pas du tout dans la mode. Mathilde a un peu baigné dedans puisque son père travaille dans le textile. Quant à moi, mes parents sont dentistes donc je n’étais pas prédestinée à atterrir là-dedans ! Mais on s’est rejointes sur cette passion commune et cette volonté de faire quelque chose de créatif.
Salut Beauté parvient à combiner l’usage initial du vêtement, c’est-à-dire s’habiller, avec quelque chose de pointu, moderne, un story-telling fort et des engagements. Peu de marques arrivent à faire ça aujourd’hui, quel est votre secret ?
On trouvait que le prêt-à-porter middle gamme manquait de propositions créatives un peu plus pointues, qui changeait du tailleur pantalon hyper classique. On voulait quelque chose de décalé, tout en racontant une histoire, pas uniquement vendre des vêtements. Quand tu t’habilles, tu véhicules un message, ça veut vraiment dire quelque chose sur ta personne. On voulait transmettre cette ambition, avec des pièces fortes, qu’on remarque, tout en restant amusant et créatif, sans se prendre au sérieux !
Quelles ont été vos priorités quand vous avez démarré l’aventure ?
Au début, très fouillis ! On connaissait avant tout le marketing, donc a pris énormément de plaisir à travailler la marque. Pour le produit, comme ce n’était pas notre domaine de compétence, on était davantage dans la souffrance ! On a tout de suite voulu avoir l’air crédible et se démarquer de toutes les marques home made qui se lancent sur Instagram. On voulait faire rêver, tout en étant ultra transparent. Le fait d’avoir des shootings assez travaillés, avec des vraies mannequins, où on a mis le budget, c’était important pour nous. On s’est donc lancées avec 5 costards, 10 références, 50% à l’image 50% à la prod. Aujourd’hui, avec le recul et l’expérience, on prioriserait différemment !
Quelles sont les valeurs que vous cherchez à faire passer à travers Salut Beauté ?
On souhaite rééduquer le consommateur sur le fait de créer et fabriquer un vêtement. Contrairement à ce qu’on nous inculque avec la fast fashion, il ne suffit pas de mettre un morceau de tissu dans une machine et il sort tout fini, comme par magie ! Dans la réalité, ça prend du temps et il y a énormément d’étapes manuelles incompressibles. Il y a de l’humain derrière les vêtements. On souhaite mettre en lumière tous ces beaux métiers de la fabrication, ce savoir-faire pas assez valorisé. C’est une évidence pour nous de les prendre en vidéo et de les poster Instagram. Aujourd’hui, on fait presque 100% de pré-commande, les clientes attendent entre 2 et 3 mois avant de recevoir leurs costumes, mais cela fait partie du jeu : un vêtement doit se désirer, s’attendre un peu. On essaye aussi de faire de la pédagogie autour du prix du produit : le prix proposé est celui qui permet de vivre en tant que marque dans de bonnes conditions et de proposer un produit qualitatif, sans se gaver sur les marges, comme on dit.
Vous avez également lancé un podcast « Au pire ? », vous pouvez nous le pitcher ?
Salut Beauté est une marque qui veut beaucoup parler, on a plein de choses à dire. Le format du podcast est une manière pour nous de prendre la parole et de prôner les valeurs auxquelles on croit, en tant que jeunes femmes nées dans les années 90. « Au pire » est là pour dédramatiser cette peur de se lancer, cette peur de l’échec. On veut montrer qu’à force de travail, de temps, de chance parfois, mais de motivation et de persévérance, on arrive à créer des choses assez folles. On veut montrer cette expérience-là, pour aider les femmes à conquérir le monde, encore plus ! Se trouver, se réaliser, s’assumer tel qu’on est, s’enlever des diktats de la société…
Qu’en est-il de la distribution ? Vous êtes une marque qui réalise la majorité de son chiffre d’affaires en ligne, pourquoi ce choix ?
On a commencé comme ça et on veut rester sur ce modèle-là. Déjà, ça nous permet d’être en direct avec le consommateur. Comme on le disait, on vend au juste prix, donc nos marges sont en conséquence, on ne peut pas permettre d’être à 50/50 avec un revendeur. On doit faire des remises 1 ou 2 jours par an, pour écouler des potentiels stocks : des pièces de shooting déjà portées ou des prototypes, là, ça fait sens pour nous. Nous avons également des emplacements aux Galeries Lafayette, à la Samaritaine ou sur Printemps.com. Bien que ça ne nous rapporte rien, ça donne un peu de visibilité. Mais notre modèle ne nous permet pas de multiplier les points de vente.
Actuellement, on réalise une levée de fond et on se rend compte que ce n’est pas évident. Quand tu es une jeune marque et que tu dis que tu veux gagner de l’argent avec ta marque, que tu as un peu d’ambition, c’est mal vu… On sent que c’est tabou, vis-à-vis des autres acteurs du secteur. Et pourtant, cela parait évident que tu ne peux pas gérer une marque sans avoir un aspect business. La création, c’est 10% du boulot, le reste, c’est que de la gestion pure.
Quel a été votre premier succès, votre première fierté pour la marque ?
C’est très egotrip, mais le moment où la première star nous a porté, c’était Angèle. C’était très bizarre de voir quelqu’un de médiatisée porter des pièces qu’on avait imaginées. C’est hyper valorisant et ça contribue à la notoriété, ça alimente l’image de marque, mais il faut savoir relativiser : ce n’est pas ça qui te fait vivre non plus.
Le mot de la fin ? Assume ton ambition !
Regardez notre masterclass live avec Salut Beauté sur notre compte Instagram !