Le luxe de demain : NellyRodi x IFOP
ÉtudesRSE, transparence des process de fabrication, blockchain, impact environnemental, défense et représentation des minorités, l’industrie du Luxe est exposée à de nouvelles menaces.
NellyRodi et IFOP s’associent pour publier leur nouvel observatoire du Luxe, édition septembre 2020 : « Thinking the Unthinkable ».
Responsabilité des entreprises, transparence des process de fabrication, blockchain, impact environnemental, défense et représentation des minorités, l’industrie du Luxe est exposée à de nouvelles menaces, et doit ainsi faire face à des enjeux aussi délicats qu’exigeants.
Interview-échanges avec Stéphane Truchi, Président de l’IFOP, Julie Kosossey, International Business Developer, Audrey Roulin, Directrice Beauté et Vincent Grégoire, Directeur Insights de l’agence NellyRodi.
Pourquoi cette étude ?
Vincent Grégoire : Parce que c’est toujours en période de crise, en période de mutation profonde, qu’il faut se poser des questions.
On vit une période inédite, incroyable et on espère qu’elle ne se renouvellera pas. Mais c’est justement dans ces moments chahutés, dans ces tempêtes, qu’il faut être capitaine et prendre les bonnes décisions et choisir son cap gagnant.
La période est hautement stratégique : elle est à la fois complexe et extrêmement structurante. En Chine, le mot crise veut dire aussi opportunité. On peut y voir le côté négatif mais on peut aussi y voir le côté positif. C’est précisément le bon moment pour envisager l’avenir et se projeter dans le futur.
Julie Kosossey : Cette étude est aussi la suite de différentes collaborations entre NellyRodi et l’IFOP sur le thème des enjeux de l’Industrie du Luxe.
Nous avons des expertises qui sont extrêmement complémentaires.
D’un côté, l’IFOP fait parler les consommateurs et dégagent des réponses tangibles et concrètes. De l’autre, NellyRodi a cette force d’analyse prospective, de comprendre la société et les consommateurs et de pouvoir ensuite en tirer les fils pour proposer des outils opérationnels pour les acteurs du Luxe. Nous faisons de la prospective appliquée.
Audrey Roulin : L’approche quantitative de l’IFOP menée en pleine crise sanitaire auprès d’un échantillon de 2400 femmes vivant en Chine, en France ou aux USA détermine les priorités et attentes consommateur par marché (Chine, France, USA) et par secteur (Mode et Beauté). L’analyse qualitative de NellyRodi propose les mécaniques opérationnelles à activer en tant que marque pour répondre à ces multiples consommateurs. Nous avons ainsi créé un outil ultra opérant pour les acteurs du Luxe.
Stéphane Truchi : Je rajouterais que les choses se sont beaucoup complexifiées. Depuis une dizaine d’années, les lignes ont énormément bougé. Nous vivons actuellement une accélération de cette transformation. Cette hybridation entre le travail de tendance, de réflexion fondamentale et la confrontation aux consommateurs permet finalement de relativiser les choses, de pondérer et de hiérarchiser. C’est le but de l’étude.
Ça nous permet quand même d’avoir un diagnostic très fort, très précis et construit. Et donc cette inspiration d’un côté, d’évaluation de l’autre pour tirer des conclusions. C’est toute la richesse de cette étude.
Aujourd’hui, dans notre métier, les études se limitant au constat ne sont plus suffisantes. On a besoin de résultats augmentés ; à partir des résultats, que voit-on ? que peut-on en tirer ?
Où peut-on aller derrière ? Je pense que c’est ça qui fait toute la force et l’intérêt de cette étude : c’est plus qu’une étude, c’est une démarche d’accompagnement qui permet d’avoir un regard élargi, global.
Quelle est votre vision du luxe ? Aujourd’hui ? Demain ?S.T : J’ai une vision d’un luxe qui est obligé de changer. Pendant longtemps, le luxe imposait sa vision des choses. Aujourd’hui, il doit écouter, il doit voir et il doit regarder. Il doit s’ouvrir, intégrer, faire avec.
Fini ce luxe descendant, omnipotent. Le luxe reste puissant, mais sa puissance doit se faire avec les autres. Et quand je dis les autres, ces sont les autres géographiquement, il faut qu’il intègre différents points de vue, différentes cultures, différentes postures. Le luxe dominant ne fonctionne plus. Et deuxièmement, c’est un luxe qui est beaucoup plus exposé ; l’engagement, la preuve, la transparence, ça, c’est le luxe d’aujourd’hui et de demain. Et donc avec les jeunes générations, ça va être encore plus difficile si on n’est pas dans cette exemplarité. La posture de la marque de luxe a totalement changé et cette exposition très différente va lui imposer une autre façon d’exprimer sa stratégie, sa vision, ses produits et même sa relation.
A.R : Le luxe aujourd’hui, comme beaucoup d’autres secteurs liés aux industries créatives, ne se résume effectivement plus à l’incarnation d’un directeur artistique et/ou à la proposition produit. Il se définit désormais par ce qu’il fait vivre, ce qu’il propose aux consommateurs au-delà de l’acte d’achat, voire même parfois au-delà de son ADN. Quel liant crée t-il avec les consommateurs ?
Les nouveaux business model, en beauté notamment, adressent ces nouveaux rapports aux consommateurs au travers d’un story living où les mécaniques on et off line se répondent et se complètent. Ces modèles vont ainsi bien plus à la rencontre de leurs consommateurs.
Le luxe devient alors plus accessible, plus ouvert, plus conversationnel, plus immersif et nous n’en sommes qu’au début !
J.K : La puissance du luxe doit aujourd’hui être mise à profit d’un impact positif. Les marques sont attendues sur le rôle qu’elles vont jouer dans la société, c’est à dire que ça va beaucoup plus loin. Aujourd’hui, c’est devenu une industrie politisée qui a un rôle presque politique et qui peut substituer des institutions. Et qui doit aussi agir pour le bien de la planète et le bien des citoyens. Un rôle de responsabilité citoyenne. C’est un gros changement.
S.T : Je pense que le luxe doit rester dans une forme d’exclusivité. Peut-être qu’il s’exprimera différemment, mais pas sur les mêmes critères d’exclusivité. Le luxe devra être unique. C’est ce qu’on ressent quand même. C’est cette dimension d’entertainment, de distraire avec une forme de légèreté qui n’a pas forcément été celle du luxe. Je pense que ce luxe austère, va avoir beaucoup de mal aujourd’hui à passer l’examen de la désirabilité. Il devrait être beaucoup plus léger, avec beaucoup plus d’humour, et d’empathie.
C’est un nouveau luxe, un luxe plus ludique, plus plaisir, parce que les gens ont délibérément besoin de légèreté. Le monde est dur, le luxe a toujours une valeur de compensation. Cette compensation ne se fait pas juste par une notion d’exclusivité, elle se fait aussi dans la notion de bienveillance. La bienveillance, c’est une notion que le luxe n’avait pas beaucoup. Il y a plus de convivialité, plus de connivence.
J.K : Oui, avant on pouvait avoir de l’extravagance à travers la création : comme on peut le voir sur les podiums avec des choses assez colorées, des shows déjantés, etc. Mais aujourd’hui, cette extravagance ou cette fantaisie on la retrouve à 360°, avec toujours cette missions de Comment j’adresse mon client, quelle expérience mémorable je lui propose….
S.T : Dans les périodes de crise, le luxe est d’autant plus important qu’il compense toute la difficulté que l’on ressent. Le luxe est de plus en plus relationnel que transactionnel. Il faut qu’il y ai un leadership. Mais leadership ne veut pas dire autorité. Le leadership c’est une vision de marque avec une posture.