Le tournant éco-responsable de la Maison de joaillerie Vever
Camille Vever, CEO de la Maison de Joaillerie du même nom, retrace pour NellyRodi l’histoire de la marque pour son 201ème anniversaire. Après sa fermeture en 1982, elle relance l’entreprise familiale et lui donne un tournant éco-responsable.
1) Pouvez-vous nous raconter l’Histoire de Vever, de 1821 à aujourd’hui ? Quelle est l’identité de la marque, et comment perpétuez-vous son savoir-faire depuis 200 ans ?
Avec grand plaisir ! La Maison Vever est une maison de joaillerie familiale, créé en 1821 à Metz par mon arrière-arrière-arrière-arrière-grand-père. Nous sommes aujourd’hui la 7ème génération de la famille ! Au commencement, Vever travaillait majoritairement l’orfèvrerie, puis, plus tard, la joaillerie. C’était une entreprise locale et régionale qui a rapidement connu un succès fulgurant.
En 1872, pendant la guerre Franco-Prussienne, les habitants de l’Alsace-Lorraine doivent choisir entre la nationalité allemande et rester ; ou la nationalité française et quitter la région. Ma famille choisit la nationalité française, et s’installe Rue de la Paix. C’est à partir de cette époque que la notoriété de Vever s’accroit : elle se trouve à un endroit très stratégique pour une Maison de Joaillerie, et remporte 4 grands prix à l’occasion des Expositions Universelles durant la période Art Nouveau (1890-1914).
L’Art Nouveau est une période artistique particulière qui a frappé tous les arts décoratifs : l’architecture, le mobilier, et évidemment, la joaillerie. C’est l’apparition d’un tout nouveau type de bijoux, le « bijou d’art » ou « bijou moderne », qui n’est pas pensé uniquement par les valeurs vénales qui le composent, mais surtout pour son esthétisme. De nouveaux matériaux non précieux dans la joaillerie se développent, comme le verre, la corne, ou l’émail. L’Art Nouveau s’organise autour de 3 grands thèmes aspirationnels : la faune, la flore, et la femme. Vever va s’illustrer pendant cette période, avec son territoire créatif et sa signature stylistique.
Henri Vever, qui dirigeait la Maison jusque dans les années 1920, avait publié au début du siècle le livre « La bijouterie française au XIXe siècle (1800-1900) », toujours enseigné dans les écoles de joaillerie aujourd’hui. Après son départ, c’est son frère Paul Vever et les futures générations qui dirigerons la Maison jusqu’à la fermeture de ses portes, en 1982.
Je n’ai personnellement pas connu la Maison, ou très peu, mais j’étais consciente de son rayonnement planétaire. Très jeune, j’ai eu un déclic. Pour mes 16 ans, ma grand-mère m’a offert un bijou Vever sur lequel mon nom était inscrit. Je trouvais tellement dommage de laisser ce bijou dans son écrin… j’avais en tête, un jour, l’idée de donner un nouveau souffle à la Maison. Et il y a 3 ans, alors que j’étais Directrice Générale dans un secteur que je ne connaissais pas, et je me suis rendu compte de mes capacités, de tout ce que je savais et étais capable de faire ! Je me suis dit que si je pouvais faire ce travail, je pouvais relancer la joaillerie Vever.
J’ai fait mon analyse de marché… Et je me suis lancée. Je ne connaissais pas le monde de la joaillerie, donc je suis allée à l’Académie des Métiers d’Art. J’y ai très vite rencontré des personnes très inspirantes du secteur, qui m’accompagnent aujourd’hui, comme Sandrine De Laage qui travaillait autrefois chez Cartier.
Le 8 juin 2022, nous célèbrerons donc les 200 + 1 ans de la Maison !
2) Récemment, Vever a pris un tournant éthique et écologique en utilisant de l’or recyclé et des diamants de synthèse. Pouvez-vous expliquer ce choix ?
Quand j’ai voulu relancer Vever, il était primordial pour moi de proposer une joaillerie éco-responsable. Nos bijoux sont une ode à la nature, je voulais être cohérente et respecter mes convictions.
Le choix du diamant de laboratoire ne s’est pas imposé tout de suite. J’ai commencé par m’intéresser aux diamants de mine, mais cela s’annonçait complexe : il n’y a pas de moyen de traçabilités fiables pour déterminer où ils sont extraits, quels sont les moyens utilisés pour l’extractions, etc. Alors j’ai pensé à me tourner vers le diamant de seconde main, c’est-à-dire déjà utilisé sur un bijou, desserti puis re-serti. Mais les volumes sont limités, il faut savoir auprès de qui on se source, et il n’y a pas de label diamant de « seconde-main », on ne peut pas les dater…
Le diamant de laboratoire s’est alors imposé à moi comme un choix logique. Il allie le génie humain, capable de reproduire à la perfection un diamant créé sous terre il y a des milliards d’années, au savoir-faire des plus grands artisans du monde. Il permet une transparence totale avec le client, il n’y a pas d’intermédiaire avec le producteur, et je sais que l’empreinte carbone est contrôlée, et les conditions de travail et des employés respectées.
Nous avons également opté pour l’utilisation de l’or recyclé, puisqu’actuellement, il y a plus d’or au-dessus de la terre qu’au-dessous, et c’est un matériau qui peut être fondu et re-fondu indéfiniment. Enfin, je souhaitais que tout soit fabriqué en France, et assurer une transparence à nos clients.
Vever est la première entreprise de Haute Joaillerie à avoir le statut de marque à mission, et tout est dûment réglementé.
3) Quel est le rôle à jouer des marques de haute joaillerie dans l’éveil des consciences ?
Les jeunes générations veulent savoir d’où viennent les matériaux, elles veulent plus de transparence, et elles sont prêtes à payer plus cher pour un bijou fabriqué dans de bonnes conditions qui respectent la nature et l’Homme. Les Maisons de joaillerie traditionnelle ont compris que ces nouvelles générations étaient les clients de demain et travaillent sur ces aspects environnements et sociétaux.
L’apparition du diamant de laboratoire a mis un petit coup de fouet au secteur, et les marques portent maintenant une attention particulière à ces nouvelles alternatives écoresponsables. Kering et Cartier ont même lancé le « Watch & Jewellery Initiative 2030 » en partenariat avec le Responsible Jewellery Council. C’est une association qui regroupe les marques de joaillerie qui souhaitent réduire leurs émissions de CO2 au profit d’un impact positif sur la planète et les populations.
Les clientèles de la joaillerie et de la haute-joaillerie sont très sensibles à la valorisation du savoir-faire français, et c’est d’ailleurs une très grande force chez Vever. Un vrai travail artisanal découle de nos pièces, avec des compétences que l’on ne retrouve pas ailleurs. C’est le devoir des maisons de joaillerie de pérenniser ce travail français.
Les bijoux Vever sont à découvrir dans l’espace joaillerie du Printemps, ou dans le showroom rue de la paix, sur rendez-vous !